Urgence écologique : que peut l’éducation ?

Article – 7 avril 2025
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L’Organisation météorologique mondiale (OMM) établit dans son rapport, l’année 2023 comme la plus chaude jamais enregistrée. L’accélération de la triple crise environnementale, due à l’intensification combinée du dérèglement climatique, de la pollution et de l’effondrement de la biodiversité, oblige institutions, gouvernements, entreprises et citoyen⸱nes à œuvrer en conséquence. Face à cette urgence écologique, l’éducation joue un rôle crucial en tant que levier pour modifier les comportements de façon pérenne.

Pop’éduc
Une enfant tient une feuille de platane devant sa tête.
Photo de Alan Rodriguez sur Unsplash

Des déclarations d’intention depuis des années…

1975. La Charte de Belgrade de l’UNESCO déclare qu’un nouveau type d’éducation relative à l’environnement est nécessaire afin de  « former une population mondiale consciente et préoccupée de l’environnement et des problèmes qui s’y rattachent, une population qui ait les connaissances, les compétences, l’état d’esprit, les motivations et le sens de l’engagement qui lui permettent de travailler individuellement et collectivement à résoudre les problèmes actuels, et à empêcher qu’il ne s’en pose de nouveaux». De là, de nombreuses déclarations verront le jour : en 1992, lors de la Conférence de Rio organisée par les Nations unies, avec le chapitre 36 de l’Agenda 21 (le programme d’action pour le développement durable ). En 2015, l’ONU adopte 17 Objectifs du Développement Durable (ODD), feuille de route commune aux pays membres pour une transition vers le développement durable.

Un an après, l’article 12 de l’Accord de Paris définit un cadre d’action à l’échelle internationale et décrète que la responsabilité de la transition écologique incombe aux gouvernements. Septembre 2022, le Sommet de l’ONU sur la transformation de l’éducation propose d’instaurer un « partenariat pour une éducation verte ».  Les enfants de 1975 sont désormais des adultes qui ne peuvent que constater que rien n’a changé. Pire, la situation s’aggrave.

Pour l’UNICEF, l’éducation est la clé de la lutte contre les changements climatiques . Quant au Comité Economique et Social Européen (CESE), dans un avis rendu sur le rôle des jeunes dans la transition écologique, il suggère trois axes majeurs : « enseigner les questions de durabilité et de protection de l’environnement dès le plus jeune âge, et doter les travailleurs, jeunes comme âgés, des compétences nécessaires pour gérer l’innovation induite par la transition écologique ». Mais également « s’assurer que les organisations de jeunesse jouent un rôle de premier plan dans le processus décisionnel ainsi que dans l’élaboration et la diffusion de projets liés à la durabilité et à l’environnement » et enfin « élaborer un nouveau modèle de gouvernance plus inclusif, capable de garantir la participation active des jeunes aux processus décisionnels ».

Selon Magali Jaoul-Grammare et Anne Stenger du Centre associé au Céreq de Strasbourg, l’éducation présente l’avantage d’avoir des effets durables. Les études internationales (enquêtes PISA, World Values Surveys menées entre 2005 et 2012) démontrent qu’un niveau d’éducation plus élevé améliorerait la compréhension des risques liés à la détérioration de l’environnement, et faciliterait un passage à l’action. Ce qui permettrait à court terme d’influer sur les comportements des jeunes vis-à-vis de l’environnement afin que cette sensibilisation s’ancre dans leurs habitudes de futurs adultes. Cette éducation à l’environnement peut avoir une portée intergénérationnelle, puisque les changements opérés chez les enfants peuvent impacter leurs parents, qui seraient plus à même de modifier leurs comportements.

Toutes ces recommandations et analyses vont dans le même sens : l’éducation est bien une réponse essentielle à l’enjeu climatique. C’est, avec la formation, un moyen de prise de conscience, qui développe l’esprit critique pour questionner le modèle de société et passer à l’action. Pour autant, depuis 50 ans, aucune approche spécifique n’est détaillée, et un passage concret des mots à l’action se fait urgemment attendre.

… à une action éducative immédiate à avoir

En 1977, David Withrington, Conseiller au groupe de travail sur l’éducation de la Fédération internationale de la jeunesse pour l’éducation et la conservation de l’environnement, écrivait dans Tendances de l’éducation relative à l’environnement de l’UNESCO, que « plus les jeunes pourront prendre l’initiative de travaux consacrés à l’environnement, notamment dans le cadre d’activités de mouvements de jeunesse, plus profond deviendra leur sens personnel et collectif de l’engagement et de la responsabilité  ».

Quant à l’ADEME, « à travers ses actions sur les écoles, en lien avec l’équipe enseignante, et sur la vie extra-scolaire, avec les centres de loisirs et d’animation, la collectivité a un levier d’action essentiel pour impliquer les plus jeunes dans sa politique environnementale et former de futurs écocitoyens ».

L’éducation au dérèglement climatique est dorénavant une urgence éducative mondiale. Un effort éducatif de grande ampleur est nécessaire afin d’accélérer la transition vers un modèle de société respectueux de l’environnement. Et il reste du chemin : le rapport de l’UNESCO de 2021, intitulé « Apprendre pour notre planète », analyse les plans d’éducation et les programmes scolaires d’une centaine de pays dans le monde. Plus de la moitié d’entre eux ne font aucune référence au changement climatique et 19 % seulement mentionnent la biodiversité. Il est donc urgent de placer cette thématique comme incontournable dans toutes les actions pédagogiques.

L’école ne peut pas tout. Des démarches du Ministère de l’Education nationale telles que le label E3D (École ou Établissement en Démarche globale de Développement Durable) ont bien vu le jour, mais ne sont ni assez ambitieuses ni suffisantes face à l’enjeu. Pourtant, l’école bénéficie déjà de tout le maillage prêt à l’emploi. Dès lors, la question est de savoir pourquoi la collaboration avec le réseau extrascolaire et les associations complémentaires n’arrive pas à se faire. Et pose donc la question du rôle et de la place de l’éducation populaire.

Car l’enjeu est bien de former les jeunes à lutter pour une planète vivable. Afin qu’ils acquièrent des réflexions, comportements et méthodes de collaboration aujourd’hui pour pourvoir espérer inverser la tendance demain. Enfin, il est de la responsabilité de toutes les parties prenantes, collectivités territoriales comme gouvernements, établissements scolaires, familles, institutions, associations, éducateurs et éducatrices, d’œuvrer à créer de nouvelles façons de s’alimenter, vivre ensemble, d’habiter, de travailler et de réintégrer l’humanité dans la nature. Car l’enjeu, in fine, est de mettre fin à une société extradiviste qui épuise les ressources planétaires au profit seulement d’une minorité.