Depuis 2011 une guerre civile fait rage en Syrie. Profitant du chaos, l’État islamique du Levant (EIL), groupe fanatique d’inspiration islamiste, s’empare d’une partie de la Syrie et proclame l’instauration d’un califat. Pendant cinq ans jusqu’à sa défaite, des femmes et des hommes fanatisés et d’autres en quête d’un idéal, de gloire ou d’argent rejoignent l’EIL. Ils viennent de tous les pays, dont la France. Pendant toutes ces années, des enfants sont nés de mères françaises et depuis plus de trois ans, environ 160 enfants français, dont la plupart en bas âge, demeurent détenus dans des camps du Nord-Est syrien ouverts à la suite de la défaite militaire de l’État islamique du Levant. Ils y vivent dans des conditions dramatiques. Selon la saison, ils survivent dans le froid, la boue ou sous une chaleur accablante. La situation y a été dès l’origine décrite comme « apocalyptique » par le Comité international de la Croix Rouge.
Un cas par cas « injustifiable »
Jusqu’à présent, les autorités françaises sont restées sourdes aux appels d’organisations tant internationales, comme le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’Homme, que nationales, comme le Défenseur des droits ou la Commission Nationale des Droits de l’Homme. Elles défendent une politique de rapatriement au « cas par cas », consistant à ne procéder au rapatriement que des enfants « les plus vulnérables ». Cette politique revient à opérer une sélection arbitraire et injustifiable car, en réalité, tous les enfants détenus dans les camps de Al-Holou de Roj sont dans des situations d’extrême vulnérabilité.
Au total, seulement trente cinq enfants, en principe orphelins de père et de mère, ont été rapatriés entre 2019 et janvier 2021 et, en juin dernier, la France a enfin accepté de rapatrier trente cinq mineurs et seize mères. Depuis cette date, la situation n’a pas évolué, alors que les autres pays européens continuent, eux, de procéder au rapatriement de leurs ressortissants. La France faillit ainsi gravement à ses obligations internationales et constitutionnelles en matière de droit humanitaire et de protection de l’enfant. Cette obstination se double d’une erreur dommageable sur le plan sécuritaire, car ces enfants finiront bien par sortir de ces camps, mais dans un état de détresse et de défiance extrême vis-à-vis de la France.